La banque peut poursuivre la caution de la société en sauvegarde pour obtenir contre elle un titre exécutoire couvrant sa créance

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17/04/2021
Affaires - Commercial

Afin d’éviter la caducité de sa mesure conservatoire, une banque est fondée à obtenir un jugement de condamnation de la caution avant l’exigibilité de sa créance à son égard, sans préjuger du montant qu’elle pourrait lui réclamer en cas de défaillance – non encore constatée – de la société débitrice dans le paiement des dividendes du plan de sauvegarde.
Le créancier qui est fondé, en application des articles L. 622-28 et R. 622-26 du code de commerce, à inscrire sur les biens de la personne physique, caution du débiteur principal soumis à une procédure de sauvegarde, une hypothèque judiciaire provisoire, est tenu, pour éviter la caducité de cette sûreté, d'assigner, en application de
l’article R. 511-7 du code des procédures civiles d'exécution, la caution en vue d'obtenir contre elle un titre exécutoire couvrant la totalité des sommes dues. L'obtention de ce titre n'est pas subordonnée à l'exigibilité de la créance contre la caution, dès lors qu'il ne pourra être exécuté tant que le plan de sauvegarde sera respecté.
 
C’est le principe que rappelle la Cour de cassation dans le présent arrêt.
 
Influence du jugement arrêtant le plan de sauvegarde
 
En l’espèce, un établissement bancaire avait consenti à la société X… un prêt de 538 000 euros, dont M. Y…, gérant de la société, s'était rendu caution. Le 13 octobre 2015, cette société avait été mise en sauvegarde. Après avoir déclaré sa créance, la banque avait obtenu d'un juge de l'exécution, le 12 mai 2017, l'autorisation d'inscrire une hypothèque judiciaire provisoire sur des immeubles appartenant à M. Y…
 
Le plan de sauvegarde de la société X… ayant été arrêté le 25 avril 2017, la banque avait, le 31 mai suivant, assigné la caution devant un tribunal de commerce aux fins d’obtenir sa condamnation au paiement d’une certaine somme et de voir juger que l'exécution forcée de cette décision serait suspendue jusqu'à l'adoption du plan de redressement ou un jugement de liquidation. La banque avait été déboutée de son action.

Aux termes de l'article L. 626-11 du code de commerce : "Le jugement qui arrête le plan en rend les dispositions opposables à tous. À l'exception des personnes morales, les coobligés et les personnes ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie peuvent s'en prévaloir". Pour la cour d’appel, il résulte de ce texte que l'arrêté du plan de sauvegarde de la société X… prolonge la suspension des poursuites contre les cautions de cette société de sorte que la banque ne peut, à compter de ce plan, poursuivre le gérant en qualité de caution.

Validation de la sûreté judiciaire conservatoire

Faisant grief
à la cour d’appel de lui interdire d’inscrire une hypothèque judiciaire provisoire sur les immeubles du gérant et, donc, de faire valider la sûreté judiciaire conservatoire dont il est bénéficiaire, la banque a porté le litige devant la Cour de cassation.

Désapprouvant
la cour d’appel, la Haute juridiction casse l’arrêt au visa des articles L. 622-28, L. 626-11 et R. 622-26 du code de commerce et de l’article R. 511-7 du code des procédures civiles d'exécution : "alors que la banque était fondée, afin d'éviter la caducité de sa mesure conservatoire, à obtenir un jugement de condamnation de la caution avant l'exigibilité de sa créance à son égard, sans préjuger du montant qu'elle pourrait lui réclamer en cas de défaillance, non encore constatée, de la société débitrice dans le paiement des dividendes du plan", la cour a fait une fausse application desdits textes. D’où renvoi des parties devant une autre cour d'appel.
 
Pour aller plus loin 
Pour des compléments relatifs à l’effet du plan de sauvegarde sur les obligations de la caution, se reporter au no 4072 de l’édition 2020 du Lamy droit commercial.

 
Source : Actualités du droit