Urbanisation en Montagne : notion de groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants

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08/10/2019
Civil - Immobilier
Public - Urbanisme

Pour le Conseil d’État, l’existence de groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants suppose plusieurs constructions qui, eu égard notamment à leurs caractéristiques, à leur implantation les unes par rapport aux autres et à l'existence de voies et de réseaux, peuvent être perçues comme appartenant à un même ensemble.
En zone de montagne, le Code de l’urbanisme pose le principe de l'urbanisation en continuité de l'urbanisation existante (C. urb., art. L. 122-5 et s. ; C. urb., anc. art. L. 145-3). Jusqu'à la loi « Urbanisme et habitat » (L. n° 2003-590, 2 juill. 2003, JO 3 juill.), elle devait se réaliser en continuité avec les bourgs, villages et hameaux existants. Pour faire échec à une jurisprudence restrictive et autoriser une urbanisation en continuité de constructions ne constituant pas un hameau, la loi de 2003 a ajouté aux bourgs, villages et hameaux les « groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants » (sur le principe de l’urbanisation en continuité, v. Le Lamy Droit immobilier 2019, n° 565).
 
La Cour administrative d’appel de Lyon a notamment considéré que par groupe de constructions traditionnelles ou d'habitations existants, « il convient d'entendre un groupe de plusieurs bâtiments qui, bien que ne constituant pas un hameau, se perçoivent, compte tenu de leur implantation les uns par rapport aux autres, notamment de la distance qui les sépare, de leurs caractéristiques et de la configuration particulière des lieux, comme appartenant à un même ensemble » (CAA Lyon, 1re ch., 22 juin 2006, n° 05LY01465, Rec. CE 2006, tables ; CAA Lyon, 1re ch., 24 nov. 2009, n° 07LY02650 ; v. aussi, CAA Marseille, 1re ch., 12 juin 2015, n° 13MA01586, qui se réfère à la notion de « groupe homogène » : « que cet ensemble de bâtiments, loin de former un groupe homogène, s'étale au contraire sur plus de 400 mètres linéaires et constitue un mitage diffus qui, même doté de l'ensemble des réseaux publics, ne peut être qualifié de groupe de constructions au sens des dispositions sus-rappelées du Code de l'urbanisme, compte tenu du parti pris d'isolement des constructions qui le composent »).
 
Le Conseil d’État (CE, 1re et 4e ch., 2 oct. 2019, n° 418666, Rec. CE 2019, tables) vient préciser cette notion, telle qu’issue de l’ancien article L. 145-3, III du Code de l’urbanisme applicable au litige (v. désormais, C. urb., art. L. 122-5, art. L. 122-5-1 et art. L. 122-6).
 
Aux termes de ce texte, l'urbanisation en zone de montagne doit se réaliser en continuité avec les bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants. Lorsque la commune est dotée d'un plan local d'urbanisme ou d'une carte communale, ce document peut délimiter les hameaux et groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants en continuité desquels il prévoit une extension de l'urbanisation, en prenant en compte les caractéristiques traditionnelles de l'habitat, les constructions implantées et l'existence de voies et réseaux. Lorsque la commune n'est pas dotée d'un tel document, les notions de hameaux et de groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants doivent être interprétées en prenant en compte les critères susmentionnés.
 
Pour les Hauts magistrats, il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires de la loi « Urbanisme et habitat » qui les a modifiées, que l'urbanisation en zone de montagne, sans être autorisée en zone d'urbanisation diffuse, peut être réalisée non seulement en continuité avec les bourgs, villages et hameaux existants, mais également en continuité avec les « groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants ». Dès lors, est ainsi possible l'édification de constructions nouvelles en continuité d'un groupe de constructions traditionnelles ou d'un groupe d'habitations qui, ne s'inscrivant pas dans les traditions locales, ne pourrait être regardé comme un hameau.
 
Ils précisent ensuite que « l'existence d'un tel groupe suppose plusieurs constructions qui, eu égard notamment à leurs caractéristiques, à leur implantation les unes par rapport aux autres et à l'existence de voies et de réseaux, peuvent être perçues comme appartenant à un même ensemble ».
 
En l’espèce, pour juger que les projets n'étaient pas situés en continuité avec un groupe d'habitations existant et annuler les permis de construire litigieux, la Cour administrative d’appel de Marseille avait relevé que « les habitations existantes dans ce secteur, au nombre d'une dizaine, étaient espacées de 25 à 40 mètres et que le secteur n'était pas desservi par les réseaux d'eau et d'assainissement ». Le Conseil d’État retient qu’en se fondant sur ces critères pour juger, « au terme d'une appréciation souveraine non arguée de dénaturation, portée au regard des prescriptions de la directive territoriale d'aménagement des Alpes-Maritimes, que les permis attaqués méconnaissaient les dispositions de l'article L. 145-3 [précité], la cour n'a pas commis d'erreur de droit ».
 
Pour aller plus loin sur les dispositions particulières applicables en zone de montagne, v. Le Lamy Droit immobilier 2019, nos 560 et s.
Source : Actualités du droit